Neil Young a annoncé sur son site officiel son retour imminent sur Spotify, deux ans après avoir retiré l’intégralité de son catalogue de la plateforme de streaming pour protester contre la désinformation sur le Covid-19. Cette décision inattendue du chanteur folk-rock intervient alors qu’il avait quitté Spotify avec fracas en janvier 2022, dénonçant la diffusion de « mensonges » dans le podcast de l’animateur controversé Joe Rogan. Malgré une qualité audio jugée moindre, l’artiste de 77 ans a finalement décidé de remettre sa musique à disposition des millions d’utilisateurs de Spotify dans un souci d’équité et d’accessibilité.
Un retournement de situation surprenant
Le revirement de Neil Young est d’autant plus étonnant qu’il avait adopté une position ferme et tranchée lors de son départ de Spotify.
« Je fais cela parce que Spotify diffuse de fausses informations sur les vaccins. Ils peuvent avoir Rogan ou Young. Pas les deux », avait-il déclaré en 2022, fustigeant le podcast de Joe Rogan accusé de relayer des théories complotistes.
Son combat éthique avait été salué et soutenu par d’autres artistes comme Joni Mitchell.
Mais dans un message posté le 13 mars, Neil Young a expliqué les raisons de son retour. Constatant que les services concurrents comme Apple Music et Amazon Music avaient également commencé à héberger des « podcasts de désinformation », il a estimé que quitter toutes les plateformes de streaming n’était pas une solution viable.
« Ma musique n’aurait alors que très peu de diffusion en streaming pour tous les amoureux de musique », a-t-il justifié.
Faute de mieux, il a donc choisi de revenir sur Spotify avec « l’espoir sincère que la qualité du son s’améliorera ».
Une décision pragmatique malgré des réserves
Si Neil Young consent à remettre ses chansons sur Spotify, il ne cache pas son insatisfaction quant à la qualité audio proposée.
« Mes chansons seront toutes là pour vous, sauf le son que nous avons créé », a-t-il ironisé, invitant les mélomanes exigeants à se tourner vers des plateformes hi-res comme Qobuz ou Tidal pour profiter pleinement de sa musique.
Un tacle à peine voilé qui montre que sa relation avec Spotify reste teintée d’amertume et de défiance.
Ce comeback a aussi une dimension promotionnelle assumée. Il intervient à point nommé, un mois avant la sortie de « World Record », le nouvel album de Neil Young & Crazy Horse attendu le 18 novembre.
Privé d’une vitrine de taille ces deux dernières années, l’artiste canadien a sans doute jugé plus stratégique de réinvestir Spotify à l’approche de cette échéance cruciale. Une manière de toucher un public plus large et connecté, quitte à mettre de côté temporairement ses griefs.
Les réactions mitigées des fans
L’annonce du retour de Neil Young sur Spotify a suscité des réactions contrastées parmi ses fans. Si certains se réjouissent de pouvoir à nouveau streamer facilement ses classiques, d’autres s’interrogent sur la cohérence de sa démarche.
Beaucoup saluaient son intégrité et son engagement en 2022, quand il avait préféré se priver de royalties conséquentes plutôt que de cautionner la désinformation. Ils ont du mal à comprendre ce qui a changé, Joe Rogan étant toujours présent et influent sur Spotify.
Sur les réseaux sociaux, les avis oscillent entre compréhension pragmatique et déception idéaliste.
Ses soutiens les plus fidèles relativisent sa volte-face en soulignant qu’à 77 ans, l’essentiel est qu’il puisse continuer à vivre de sa musique.
Spotify, grand vainqueur de ce bras de fer
Au final, le grand gagnant de ce bras de fer semble être Spotify. Malgré la fronde initiée par Neil Young, la plateforme n’a pas cédé et a maintenu sa collaboration avec Joe Rogan. Pire, son modèle s’est propagé chez les concurrents, rendant vaine toute tentative de boycott. En faisant son retour, Neil Young entérine en quelque sorte la victoire de Spotify et le statu quo généré par sa position dominante.
Reste à voir si cela incitera d’autres artistes à revenir également au bercail, de guerre lasse. Le combat de Neil Young pose en tout cas la question de la responsabilité et de l’éthique des plateformes de streaming, devenues des acteurs incontournables de l’industrie musicale.
Face à leur pouvoir grandissant, les artistes semblent de plus en plus démunis pour peser individuellement. À défaut d’avoir gagné, Neil Young aura au moins eu le mérite de soulever le débat.